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La maison natale - Tours

HONORÉ DE BALZAC EN TOURAINE

 

 

C’est une rue tousiours neufve, tousiours royale, tousiours impériale, une rue patrioticque, une rue à deux trottoirs, une rue ouverte des deux bouts, bien percée, une rue si large que iamais nul n’y ha crié : Gare ! une rue qui ne s’use pas, une rue qui mène à l’abbaye de Grant-Mont et à une tranchée qui s’emmanche trez-bien avecques le pont, et au bout de laquelle est ung beau champ de foire ; une rue bien pavée, bien bastie, bien lavée, propre comme ung mirouer, populeuse, silencieuse a ses heures, cocquette, bien coëffée de nuict par ses iolis toicts bleus ; brief, c’est une rue où ie suis né ; c’est la royne des rues, tousiours entre la terre et le ciel, une rue à fontaine, une rue à laquelle rien ne manque pour estre célébrée parmi les rues ! Et, de faict, c’est la vraie rue, la seule rue de Tours.

Honoré de Balzac, L'Apostrophe

 

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Naissance d’Honoré de Balzac

 

Honoré Balzac naît le 20 mai 1799 au n°25 rue de l’Armée d’Italie (actuelle rue Nationale). Il est l’aîné d’une union arrangée entre la fille du directeur de la Régie des hospices de Paris et l’un des nouveaux notables de la ville de Tours, Bernard-François Balzac (1746-1829). Âgé de 53 ans, il est en poste à Tours depuis quatre ans en tant que directeur des vivres de la 22e division militaire lorsqu’il épouse Anne-Charlotte-Laure Sallambier (1778-1854), issue d’une famille aisée qu’il côtoyait dans le quartier du Marais à Paris.

 

 

Nourri Par Étrangère

 

Comme l’indique la mention en marge de son acte de naissance (Nourri Par Étrangère), Honoré de Balzac est placé en nourrice. Il racontera dans une lettre de 1846, adressée à Mme Hanska : « Je ne t’ai jamais dévoilé cette plaie, elle était trop horrible, et il faut le voir pour le croire. Aussitôt que j’ai été mis au monde, j’ai été envoyé en nourrice chez un gendarme, et j’y suis resté jusqu’à l’âge de quatre ans »[1]

 

Sa sœur le confirmera dans la biographie qu’elle publie en 1858 : « Ma mère avait perdu un premier enfant en voulant l’allaiter. On choisit pour le petit Honoré une belle nourrice qui demeurait à la porte de la ville, dans une maison bien aérée et entourée de jardins. Mon père et ma mère furent si contents des soins de cette femme qu’ils me firent élever aussi par elle et lui laissèrent mon frère après son sevrage. Il avait près de quatre ans quand nous revînmes ensemble à la maison paternelle »[2].

 

Dans l’une de ses œuvres de jeunesse, Sténie ou Les erreurs philosophiques, le personnage principal inventé par Honoré cherche à retrouver sa nourrice : « Le désir de revoir le petit village de Saint-Cyr où demeurait ma nourrice me fit diriger mes pas de ce côté. Je m’informai si Manon Viel vivait encore, dans le dessin de lui procurer une douce aisance qui dorât ses vieux jours. J’appris avec douleur qu’elle était morte ». En considérant que le romancier s’inspirait souvent de son propre vécu dans ses récits, on a donc estimé que sa nourrice pouvait habiter Saint-Cyr sur Loire [3]. Cependant, il est important de préciser qu’aucun élément tangible ne permet de localiser le lieu où Balzac a passé les premières années de sa vie.

 

 

Carrière ascendante de M. Bernard-François Balzac

 

Pendant qu’Honoré et Laure sont en nourrice, leur père continue de faire carrière. Il bénéficie directement de la nomination de son ami, le général René-François de Pommereul (1745-1823) à la tête de la préfecture d’Indre-et-Loire [4]. En octobre 1803, M. Balzac devient administrateur de l’Hospice général de Tours [5]. Deux mois plus tard, il est nommé adjoint au maire de Tours, en tant qu’officier public de l’État civil [6]. En janvier 1804, il achète une demeure située au 29 rue d’Indre-et-Loire (actuelle rue Nationale). C’est alors que les aînés des enfants Balzac rentrent chez leurs parents ; Honoré est inscrit dès le mois d’avril comme externe à la pension Le Guay [7].

 

 

Pose d’une plaque commémorative

 

À la mort d’Honoré de Balzac en 1850, James Cane (1798-1868) finance la pose d’une plaque commémorative pour la façade de la maison natale de Balzac. James Cane était né le 8 décembre 1798 au n°25 de la rue de l'Armée d'Italie avant l’installation de la famille Balzac. Il était vraisemblablement l’un des « camarades de jeux d’Honoré »[8].

 

C’est Adrien Brun (1800-1876), l’un des condisciples de Balzac au collège de Vendôme, qui se charge de faire apposer cette plaque ; il est alors préfet d’Indre-et-Loire (1850-1856). Adrien Brun avait repris contact avec Balzac après le succès de La Peau de Chagrin en 1831 : « Mon cher Camarade, je ne sais si tu te rappelles un jeune condisciple d'un physique assez frêle et délicat, d'un caractère un peu timide et réservé […]. Ce philosophe en herbe, si je m'en souviens bien, sympathisait assez avec tes penchants. Tu lui communiquais quelquefois les essais littéraires, qui dès lors occupaient profondément ta jeune imagination. Tu lui faisais admirer tes horloges improvisées et construites dans la solitude de la prison ou de l'alcôve […] »[9].

 

Christelle Bréion (musée Balzac, Saché)




[1] Lettre d’Honoré de Balzac à Mme Hanska, LHB, II, p.146.

[2] Laure Surville, Balzac, sa vie et ses œuvres, d’après sa correspondance, Jaccottet, Bourdilliat et Cie, 1858, p.3-4.

[3] Lucette Besson, « Les parents nourriciers de Balzac », L’Année balzacienne, 1988, p.27-44.

[4] Roger Pierrot, Honoré de Balzac, Fayard, La Flèche, 1994, p.18.

[5] Ibid., p.20.

[6] Ibid., p.20.

[7] Ibid., p.20.

[8] Cf. Madeleine Fargeaud, Roger Pierrot, « Henry le trop aimé », L’Année Balzacienne, 1961, p.30.

[9] Lettre d’Adrien Brun à Honoré de Balzac, Bazas, 14 avril 1831, Corr., I, n°290, p. 509-510.

 

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