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Le film de Marcel Cravenne

par Anne-Marie Baron (Paris)

 

Fiche technique

  • Titre original : Le Lys dans la vallée

  • Réalisation : Marcel Cravenne

  • Scénario : Marcel Cravenne, Armand Lanoux d'après le roman éponyme d'Honoré de Balzac

  • Image : Albert Schimel

  • Musique : Francis Seyrig

  • Couleur

  • Durée : 120 min (2h)

 

Distribution

  • Richard Leduc : Félix de Vandenesse

  • Delphine Seyrig : Madame de Mortsauf

  • Georges Marchal : Monsieur de Mortsauf

  • Alexandra Stewart : Arabelle Lady Dudley

  • André Luguet : M. de Chesse

  • Jean Bolo : le prêtre

  • Fred Personne : Docteur Origet

  • Pascale Saine : Madeleine enfant

  • Frédéric Devèze : Jacques enfant

  • Elisabeth Guildet : Madeleine adolescent

  • Thierry Bourdon : Jacques adolescent

  • Hélène Duc : Mme de Vandenesse

  • Blanche Ariel : Mme de Lenoncourt

  • Marcel Lemarchand : Sébastien

  • Reine Bartève : Manette

  • Georges Mantax : le maire

  • Armand Babel : le régisseur

  • Nicole Vassel : Corinne, la coiffeuse

 

Début du film Le Lys dans la vallée de Marcel Cravenne (1970) - 10 minutes.

 

 

Ancien assistant de Frank Capra et d’Erich Von Stroheim, Marcel Cravenne a travaillé essentiellement pour la télévision et s’est spécialisé dans les adaptations de grandes œuvres littéraires comme David Copperfield de Charles Dickens en 1965, Tartuffe en 1971, ou L'Éducation sentimentale en 1973 d'après Gustave Flaubert. Il est resté fidèle à Balzac jusqu’à la fin de sa carrière puisque ses deux dernières réalisations télévisuelles recensées sont Mémoires de deux jeunes mariées (1981) et Ursule Mirouët (1984).

 

Sa réalisation du Lys dans la vallée en 1970 bénéficie d’atouts maîtres : l’adaptation d’Armand Lanoux (1913-1983) de l’Académie Goncourt, balzacien lui aussi puisqu’il adaptera en 1980 La Peau de chagrin à la télévision pour Michel Favart, son scénario et ses dialogues sont d’une grande intelligence ; d’excellents interprètes – Delphine Seyrig (Mme de Mortsauf), Alexandra Stewart (Lady Arabelle Dudley), Georges Marchal (M. de Mortsauf) et Richard Leduc (Félix) –, des décors naturels magnifiques – les châteaux et les parcs de Saché, La Chevrière, La Grande Loge, Valesnes et surtout le château de Vonnes, utilisé pour Clochegourde, mis en valeur par la photo d’Albert Schimel ; et enfin la musique de Francis Seyrig.

 

Très classiquement Marcel Cravenne suit l’ordre du roman, tellement pré-cinématographique avec son immense flash-back encadré par le début et la fin de la lettre écrite par Félix à sa fiancée Natalie de Manerville et la réponse de cette dernière. Il adopte la voix off pour quelques retours sur l’écriture du récit autobiographique contenu dans la lettre-cadre et met en scène les dialogues à l’intérieur du château et dans le parc de Clochegourde.

 

Très fidèle à l’intrigue, le film rend bien l’affinité profonde entre Félix et Henriette, la similitude de leurs récits d’enfance et leur complicité heureuse dans cette vallée de Touraine dont la volupté les gagne. Le cinéaste les montre soumis à la tentation et résistant à l’appel des sens au prix de la vie d’Henriette. Il souligne la différence radicale entre Lady Dudley, femme d’acier passionnée et volontaire, et Henriette, tendre et dévouée, mais inflexible. Serait-elle une nouvelle duchesse de Langeais qui emploie la religion comme prétexte, comme le suggère perfidement Arabelle ? La rencontre des deux femmes sur les landes de Charlemagne revêt, comme dans le roman, un caractère spectaculaire. Le double dénouement, scrupuleusement mis en scène ici, montre Henriette d’abord pleine de regrets devant une vie gâchée qui lui a interdit l’amour charnel et l’a fait mourir de faim et de soif, puis confessant des fautes vénielles et demandant pardon à son mari et à Félix comme une véritable sainte qui voit en Arabelle l’instrument de la punition divine.

 

Marcel Cravenne a fait partie de l'École des Buttes-Chaumont, caractérisée par ses gros plans et l'unité de son style, qui l’ont fait taxer de lourdeur et d’académisme. Cravenne se sentait pourtant très différent de ses confrères Lazare Iglesis et Stelio Lorenzi. Cette réalisation réussit en tout cas à faire jaillir l’émotion, grâce à l’interprétation de Delphine Seyrig, aussi bouleversante dans sa grandeur de femme irréprochable que quand elle dit à Félix : « J’avais soif de toi ». Sa voix inimitable correspond bien à la « voix d’or » d’Henriette. Georges Marchal compose un M. de Mortsauf parfait, à la fois colérique, drolatique et tyrannique. Le jeune Richard Leduc, acteur fétiche d’Alain Robbe-Grillet, rend avec sobriété la passion contenue, et sa mélancolie nous gagne. Alexandra Stewart est tout à fait crédible en lady Dudley, belle, passionnée, impérieuse et soumise à la fois.

 

> Voir le début du film (10 minutes) sur le site de l'INA

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