Portrait de Balzac, par Eugène Chiquet, 1899, d’après Achille Devéria (1825), collection musée Balzac.

Saché, le refuge

Né à Tours en 1799, Honoré de Balzac devient parisien dès l'âge de 14 ans. De 1825 à 1848, le romancier fait une dizaine de séjours à Saché. Ce lieu constituait pour lui non seulement un refuge vis-à-vis de ses créanciers mais également un "monastère" dont il appréciait le calme pour écrire et se ressourcer. L’écrivain souffre dès les années 1830 de problèmes pulmonaires et cardiaques. Son médecin, le docteur Nacquart, lui ordonne alors régulièrement d’aller respirer l’air natal pour se remettre d’une activité parisienne trop intense. Les séjours de Balzac à Saché sont ainsi parfois ponctués de longues promenades dans les bois centenaires du domaine, de visites chez les châtelains des environs ou encore de parties de whist ou de tric-trac avec Jean Margonne, le propriétaire des lieux.

1823

Au cours de l'été 1823, Balzac séjourne à Tours et à Vouvray, dans la propriété du beau-père de Jean Margonne, Henry-Joseph de Savary. Dans une lettre à sa sœur Laure Surville, il envisage alors d’aller à Saché : "Je vais aller à Saché et revenir bientôt à Ch[amp]rosay vous revoir car excepté l’air et le ciel qui est tout d’azur, la Touraine a des habitants bien mols et lâches" (Honoré de Balzac, Lettre à Laure Surville, Tours, été 1823).

1825

Durant l'automne 1825, Balzac revient en Touraine en compagnie de sa mère et de son frère cadet, Henri, fils présumé de Jean Margonne. Balzac écrit depuis Saché à la Duchesse d'Abrantès, regrettant qu'elle ne puisse le rejoindre.

1830

Alors que Balzac collabore de manière intensive à différents journaux parisiens, il prend le temps de venir se reposer en Touraine avec son amante Mme de Berny durant l'été 1830. Ils louent pendant deux mois La Grenadière, maison située à Saint-Cyr-sur-Loire depuis laquelle ils font une escapade au Croisic et à Guérande. Balzac revient à Paris en septembre. Il vit la Révolution de Juillet loin de Paris et, très probablement, sur le chemin de Saché : "Je vous assure que je me considère comme un homme très courageux d’avouer que je voyageais sur les bords de l’Indre pendant nos glorieuses journées" (Honoré de Balzac, "Lettre sur Paris", publiée dans Le Voleur, 30 septembre 1830).

1831

En août 1831, Balzac met en vente sa première édition de La Peau de chagrin. Depuis Tours, Jean Margonne écrit à Balzac combien il est difficile de se procurer le roman dont il a vu le succès dans les journaux. Et même s’il compte bien l’emporter à la campagne pour le lire, il estime que cela ne le dédommage pas de la conversation avec l’auteur dont il espère jouir au mois de septembre. Balzac fait finalement un séjour prolongé au château de Saché entre fin octobre et mi-décembre 1831. Les lettres échangées avec ses éditeurs et ses amis témoignent de travaux intenses d’écriture sur Maître Cornélius ou encore les Contes drolatiques : "Je vis sous le plus dur des despotismes : celui qu’on se fait à soi-même. Je travaille nuit et jour. Je suis venu me réfugier ici au fond d’un château, comme dans un monastère." (Honoré de Balzac, Lettre à Zulma Carraud, Saché, 21 novembre 1831)

1832

Le 8 juin 1832, Balzac est de retour à Saché où il reste plus d'un mois. Depuis sa petite chambre du second étage, il donne à sa mère des consignes pour qu'elle assure le suivi de ses affaires à Paris, en particulier le règlement de ses problèmes financiers... Balzac s’impose par ailleurs un rythme infernal pour écrire Louis Lambert. Mais il profite également de son séjour à Saché pour organiser son mariage éventuel avec une riche veuve des environs, la baronne Deurbroucq. Balzac part de Saché le 16 juillet 1832 et doit faire le trajet jusqu’à Tours, à pied, en pleine chaleur.

1834

En septembre 1834, après la publication de La Recherche de l'Absolu, le Docteur Nacquart trouve Balzac si abattu qu'il lui ordonne l'air natal. Balzac passe ainsi plusieurs semaines à Saché où il commence Le Père Goriot, espère finir Séraphîta et corrige des épreuves de César Birotteau.

1836

Balzac s'enfuit dans la vallée de l'Indre en juin 1836, peu de temps après avoir gagné son procès contre Buloz au sujet du Lys dans la vallée. Même si Balzac profite de son séjour pour se reposer, il commence néanmoins à Saché la rédaction de la première partie d'Illusions perdues, travaillant jusqu'à quinze heures par jour : "La Touraine m’avait si bien ravitaillé que jeudi, vendredi, samedi et dimanche, j’ai conçu les Illusions perdues, et j’en ai écrit les quarante premiers feuillets". (Honoré de Balzac, Lettre à Émile Regnault, Saché, 27 juin 1836).

1837

Après avoir passé plusieurs mois en Italie, Balzac se ressource à Saché une dizaine de jours fin août pour combattre une inflammation de poitrine. En vue d’échapper de manière définitive à l'obligation de la Garde nationale, Balzac envisage un instant de se retirer en Touraine, dans une petite maison sur la côte du Cher ou de la Loire.

1846

Début juin, Balzac utilise le chemin de fer pour se rendre rapidement en Touraine en vue d'y acheter une résidence pour lui et Mme Hanska. Il demeure quelques jours à Saché chez Jean Margonne qui, entre deux parties de tric-trac, lui conseille de faire l'acquisition du Château de Moncontour à Vouvray, projet auquel Balzac renoncera deux mois plus tard.

1848

Balzac séjourne tout le mois de juin à Saché, loin des agitations parisiennes. Mais il ne trouve pas l'inspiration pour écrire Les Petits Bourgeois. Il consacre la plus grande partie de son temps aux promenades et aux parties de whist. Or, à la fin de son séjour, Balzac commence à ressentir les premiers symptômes d'une grave maladie du cœur. En septembre, il rejoint Mme Hanska en Ukraine où il reste un an et demi.