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La Femme de trente ans - Tours

L'ŒUVRE DE BALZAC ET LA TOURAINE

 

 

Dans ce roman, le passage du duc d’Angoulême à Tours fait écho au même évènement évoqué dans Le Lys dans la vallée.

 

Cependant, au milieu des fêtes qui marquèrent le retour des Bourbons, un malheur bien profond, et qui devait influer sur sa vie, assaillit la pauvre Julie : elle perdit la comtesse de Listomère-Landon. La vieille dame mourut de joie et d'une goutte remontée au cœur, en revoyant à Tours le duc d'Angoulême.

 

Plusieurs extraits de ce texte paraissent en revue au début des années 1830 ; On peut citer Le Rendez-vous (La Revue des deux mondes, 1831) où l’on retrouve certains premiers jets des extraits présentés ici.

 

-- Le beau pays ! s'écria-t-elle. Dressons une tente et vivons ici. Victor, cria-t-elle, venez donc, venez donc !

Monsieur d'Aiglemont répondit d'en bas par un cri de chasseur, mais sans hâter sa marche, seulement il regardait sa femme de temps en temps lorsque les sinuosités du sentier le lui permettaient. Julie aspira l'air avec plaisir en levant la tête et en jetant à Arthur un de ces coups d'oeil fins par lesquels une femme d'esprit dit toute sa pensée.

-- Oh ! reprit-elle, je voudrais rester toujours ici. Peut-on jamais se lasser d'admirer cette belle vallée ? Savez-vous le nom de cette jolie rivière, milord ?

-- C'est la Cise.

-- La Cise, répéta-t-elle. Et là-bas, devant nous, qu'est-ce ?

-- C'est les coteaux du Cher, dit-il.

-- Et sur la droite ? Ah ! c'est Tours. Mais voyez le bel effet que produisent dans le lointain les clochers de la cathédrale.

Elle se fit muette, et laissa tomber sur la main d'Arthur la main qu'elle avait étendue vers la ville. Tous deux, ils admirèrent en silence le paysage et les beautés de cette nature harmonieuse. Le murmure des eaux, la pureté de l'air et du ciel, tout s'accordait avec les pensées qui vinrent en foule dans leurs cœurs aimants et jeunes.

-- Oh ! Mon Dieu, combien j'aime ce pays, répéta Julie avec un enthousiasme croissant et naïf. Vous l'avez habité longtemps ? reprit-elle après une pause.

A ces mots, lord Grenville tressaillit.

-- C'est là, répondit-il avec mélancolie en montrant un bouquet de noyers sur la route, là que prisonnier je vous vis pour la première fois....

 […]

L'influence exercée sur l'âme par les lieux est une chose digne de remarque. Si la mélancolie nous gagne infailliblement lorsque nous sommes au bord des eaux, une autre loi de notre nature impressible fait que, sur les montagnes, nos sentiments s'épurent : la passion y gagne en profondeur ce qu'elle paraît perdre en vivacité. L'aspect du vaste bassin de la Loire, l'élévation de la jolie colline où les deux amants s'étaient assis, causaient peut-être le calme délicieux dans lequel ils savourèrent d'abord le bonheur qu'on goûte à deviner l'étendue d'une passion cachée sous des paroles insignifiantes en apparence. Au moment où Julie achevait la phrase qui avait si vivement ému lord Grenville, une brise caressante agita la cime des arbres, répandit la fraîcheur des eaux dans l'air, quelques nuages couvrirent le soleil, et des ombres molles laissèrent voir toutes les beautés de cette jolie nature.

 

Nathanaël Gobenceaux (musée Balzac, Saché)

 

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